23/11/2011
Le mouvement islamiste turc Vision Nationale à l'assaut de l'Europe
Extrait du "Dossier du mois" du mensuel de l'Observatoire de l'islamisation
"Tout est parti de la volonté d’un seul homme, Necmettin Erbakan (photo), principal acteur politique de l‟islamisme turc de ces 40 dernières années. Sa première tentative de prendre le pouvoir par la voie démocratique, date de la création en 1970 de son Parti de l‟Ordre national. Parti perçu comme la branche politique de la confrérie islamique Nakshibandi, ses excès programmatiques axés sur l‟anti-maçonnisme, l‟anti-occidentalisme, la critique de la laïcité, ne tardèrent pas à le marginaliser. Voulant remplacer ouvertement dans les écoles publiques certains enseignements d‟Emile Durkheim au profit de penseurs islamiques connus pour leur rejet des « innovations blâmables », comme al-Ghazali (1058-1111), ou Ahmed Shirindi (1564–1624), référence de la confrérie islamique Nakshibandi, il provoqua sérieusement l‟inquiétude des autorités. D‟autant qu‟une part grossissante d‟une autre confrérie de masse, les Nurcu, commença à rejoindre ses rangs…Le coup d‟état de 1971, effectuée par l‟armée gardienne de la laïcité (dépositaire de l‟héritage du premier président Mustafa Kemal, militaire ayant aboli le califat en 1924) régla -temporairement- le sort de la formation islamiste, et pour Erbakan, marqua le début de son exil en Suisse et en Allemagne pour nombre de ses collaborateurs, pays à partir desquels il va fomenter le retour de l‟islamisme à vocation démocratique. C‟est le Parti du salut national (MSP) qui succèdera au Parti de l‟ordre national, avec un Necmettin Erbakan restant dans l‟ombre, recyclant les cadres du parti dissous, qui reprendra ses thèmes favoris. Il n‟eut qu‟à attendre 1974 pour participer à un gouvernement de coalition au terme d‟un succès dans les urnes, qui permettra au tout jeune parti de briguer des portefeuilles ministériels de premier ordre (Intérieur, Commerce, Justice et industrie…) et d‟installer Erbakan au poste de Premier ministre. Durant cette période, son influence permet de recruter 5000 imams et muezzin à la direction des Affaires religieuse, pour la seule année 1974 !
La parenthèse européenne de Necmettin Erbakan nous intéresse grandement, car c’est lui qui posa les jalons de la diffusion de l’islamisme turc, d’abord en Allemagne où naquit le Millî Görüs, littéralement Idéologie ou Vision nationale, formant une base arrière stable indispensable tout au long d‟un vingtième siècle rythmé par les coups d‟Etat successifs et les persécutions à l'encontre des différentes formations islamistes qu‟il contrôla. L‟Europe allait donner, par ses généreux droits de l‟homme et sa névrotique quête de « diversité », un cadre de liberté idéal afin que le mouvement se structure via ses journaux, radios et évidemment mosquées qui ne tarderont pas à pousser.
Près de 40 ans après ses débuts en Allemagne, le Millî Görüs, dont le logo est la carte de l’Europe enchâssée d’un croissant islamique, est devenu une pieuvre tentaculaire ayant essaimé dans tous les pays d’Europe, et la France n’est pas en reste, nous allons le voir.
Le quotidien allemand Die Ziet, dans un article consacré au mouvement en 1999, recensait déjà 500 mosquées outre-Rhin pour 26500 membres, sans parler des sympathisants beaucoup plus nombreux. La réforme du code de la nationalité en 2001, donnant la nationalité allemande à près de 2,5 millions de turcs, fut une véritable aubaine afin de peser dans le débat public et d‟obtenir une oreille attentive des autorités fédérales. D‟autant que l‟islam obtint quelques mois plus tard d‟Otto Schily, alors ministre de l'Intérieur, la reconnaissance au même titre que les Eglises chrétiennes en bénéficiant du statut très avantageux de collectivité de droit public, permettant aux islamistes d‟obtenir des cours de religion dans les écoles en plus de financements conséquents !
(implantation des mosquées du mouvement en France. source)
Le Djihad, un pilier pour Vision Nationale
Necmettin Erbakan , avait souligné lors d'un discours prononcé le 13 mai 1991 dans la ville de Sivas combien le djihad est important dans la lutte pour la prise du pouvoir politique:
"Le Parti de la Prosperité (Refah Partisi) est une armée. Tu dois travailler de toutes tes forces pour que cette armée grandisse. Ce parti est l'armée de la guerre islamique. Tu ne peux pas mener tes propres actions en te disant que tu fais ta propre guerre. Les actions qui sont menéesnsans demander l'avis du quartier ne sont que discorde. Si tu travailles, tu travailles ici. Es-tu musulman ? Alors tu es obligé d'être un militaire dans cette armée. On ne devient pas musulman sans donner de l'argent au Djihad. Nous, nous sommes musulmans. Nous devons soutenir le Parti de la Prosperité (RP) car nous désirons le djihad. Tous ceux qui travaillent consciemment pour le Parti de la Prospérité vont au paradis, pourquoi? Parce que Prospérité signifie travailler pour faire régner l'ordre coranique" cité dans Refah partisi kapatma davasi, Istanbul, Ed.Kaynak, 1998. p287
Les obligations des idéologues de Vision Nationale sont indiquées dans les documents du mouvement intitulés "les prêcheurs, les membres, les gestionnaires et les propriétés liées". La traduction est parue dans le livre du sociologue turc Mustafa Pekoz, Le développement de l’islam politique en Turquie (L’Harmattan, 2011). Le contenu est édifiant :
" 9- Chaque individu membre de Vision Nationale doit s'engager dans la guerre religieuse (djihad) sur le chemin de Dieu. Pour que le djihad se réalise avec le bien et l'existence, le membre doit tout d'abord avoir son attention tout à Dieu et se conditionner de manière à être prêt à tout moment pour le djihad.
10- Tout combattant appartenant à l'Organisation Vision Nationale doit savoir que (...)
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09:21 Publié dans 22- TURQUIE | Lien permanent | Commentaires (0) | | Facebook | |
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